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ROBERT (Martial), Pierre Schaeffer : des Transmissions à Orphée, Paris, L'Harmattan, 1999, 13 planches, 416 p.

 

AVANT-PROPOS


"Mieux vaut faire, et se repentir, Que se repentir, et rien faire."

 

DE SAINT-GELAIS (Mellin) (1491-1558)

(in Quatrains LXXVIII.)

 

  Aujourd'hui, aucune discipline ne peut négliger l'influence des médias dans son appréhension, sa compréhension, voire son développement. Parmi les arts -déjà moyens de communication eux-mêmes-, la musique subit encore davantage cette nouvelle loi puisqu'elle est bien évidemment encore plus sensible que d'autres à la diffusion. Quant à la recherche musicale, son orientation a pu être très influencée par les modes et les hommages...
    Sans même se heurter à ce débat, il fut une période où la musique dut vraiment son évolution au moyen de communication d'alors : la radiodiffusion.
    Nous n'aborderons pas ici le problème de la diffusion musicale à la radio, mais celui de l'écriture musicale modifiée par un apport technologique issu du monde de la communication.
    Cette rencontre entre la radiodiffusion et la musique s'est faite pour les uns grâce à un homme, pour les autres à cause d'un homme qui appartenait à ces deux milieux par le contexte familial et professionnel. Tant et si bien que l'histoire de l'évolution, en France, des deux disciplines pendant plusieurs décennies, allait se concentrer autour de son activité débordante.
    Aussi notre démarche sera-t-elle axée autour de cet homme et de son oeuvre totalement représentatifs. Notre investigation est dès lors encadrée par deux dates majeures : 1936 pour l'entrée de cet homme à la radiodiffusion et 1986 pour son retrait de la scène. Cependant, les explications se trouveront parfois en amont, les conséquences des actes comme les rendez-vous manqués en aval de ces deux années délimitant la carrière de Pierre Schaeffer.
    Il faut tenter de rétablir la vérité à propos de cette carrière qui a suscité bien des discussions et polémiques, et ainsi éclairer des points obscurcis ou même brouillés par une communication partielle, donc partiale. Et, en recherchant le fil conducteur qui a animé la vie de cet homme, se doter des moyens pour ne pas tomber, nous, créateurs, musiciens, critiques, lecteurs et auditeurs, diffuseurs ou consommateurs d'information, dans le piège de la communication outrancière de notre époque.

    Les ouvrages de référence de nos bibliothèques n'ont pas évincé le nom du véritable initiateur, cité dans toutes les chronologies contemporaines mais dont ils restreignent bien souvent, sinon toujours, la démarche -non analysée suivant sa totalité- à un seul domaine.
    Dans les années 1970, deux ou trois ouvrages ont tenté de tracer la ligne droite du sens qui remonte des activités au destin, et d'explorer "L'espace du dedans"(1), de révéler, -même par l'allégorie- un "personnage hors mesure"(2). L'auteur de romans, passé lui quasi inaperçu, plaçait sans aucun doute le lecteur dans une perplexité certaine.
    La puissance du vide des demi-mots et des maux nés d'interprétations à craindre s'amplifiait donc avec le temps et justifiait plus que jamais la nécessité d'un travail complet. Afin que notre regard soit imperméable aux passions, nous avons décidé de travailler uniquement à partir des archives institutionnelles(3). Pendant plusieurs années nous avons analysé près de huit mille pages, deux cents émissions de radio et une dizaine de télévision afin de rédiger ces lignes pour la plupart écrites avant le décès de Pierre Schaeffer en août 1995. Cet événement(4), comme auparavant le quatre-vingtième anniversaire de l'homme de media et/ou musicien, puis le récent "50è anniversaire de la musique concrète" occasionnèrent enfin et heureusement, quelques hommages écrits et audiovisuels mais à la diffusion peu accessible(5).

    Communication et Musique en France entre 1936 et 1986 converge donc vers Pierre SCHAEFFER, par son action au premier plan. Presque toujours étiqueté comme l'inventeur de la musique concrète, cette classification est si prégnante qu'elle masque toute autre qualité de l'homme précurseur du domaine de la communication.
    Comment en arrive-t-on donc à cette qualification dominante de "compositeur" si nous en croyons les dictionnaires(6) ? Est-elle essentielle ? S'agit-il de vocation en admettant enfin ses pulsions internes, de mûrissement, d'une toute autre influence ou du fil hasardeux de la vie ? La voie schaefferienne a-t-elle été linéaire, préméditable sinon préméditée ? Il nous faudra plus d'un ouvrage pour y répondre pleinement(7).
    En musique, son travail de recherche, centré autour du Traité des Objets Musicaux(8) publié en 1966, a été manipulé sous tous ses angles et a subi tous les avatars d'une finalité alors que l'auteur le revendique comme prémices. Il constituera en un premier temps l'horizon de ce premier ouvrage et sera atteint par une chronologie nécessaire, afin de découvrir les origines du personnage, mais aussi par la logique de l'expérience propre à la vie, expliquant le passage de la radiodiffusion à l'invention musicale soit Des transmissions à Orphée.

   

Du Premier Ministre d'alors aux Ministres concernés, des Directeurs de Sociétés ou d'Archives d'État, aux Conservateurs et Documentalistes accueillants, des Universitaires encourageants aux Amis révélés(9), nos remerciements sont nombreux. Nous n'oublions pas de même les éditeurs qui nous ont fort aimablement autorisé à reproduire les illustrations et schémas de cet ouvrage ainsi que l'I.N.A.-G.R.M. Et, plus personnellement encore, notre gratitude s'adresse à Claude SERREAU qui nous offrit ses conseils et eut l'infinie patience de la relecture.

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(1) Pour reprendre le titre de l'ouvrage d'Henri MICHAUX, Paris, Gallimard, 1944, 284 p.
(2) in VOISIN (André), Adieu Grand Berger, Paris, Laffont, 1971, couverture.
(3) Le lecteur trouvera en fin d'ouvrage la liste des archives consultées.
(4) Décès survenu le même week-end que celui du dessinateur Hugo Pratt qui, audimat oblige, eut davantage droit aux honneurs des journaux télévisés, radiophoniques et de la presse -dans l'ordre de leur inattention- que le pionnier Grand Officier de l'Ordre National du Mérite également -entre autres- Commandeur des Arts et Lettres, membre du conseil d'administration de l'Académie de France à Rome et surtout ex-membre du Haut Conseil de l'Audiovisuel !
(5) Notamment les films P.S. Mémoire 1 : "Ingénieur et/ou artiste ?", Mémoire 2 : "La recherche ?", de Michel HUILLARD et P.S. mais diffusés à une heure fort tardive et pas encore disponibles dans le commerce. Cf. notre FILMO-VIDÉOGRAPHIE en fin d'ouvrage.
(6) Nous les avons examinés sur plus de trente années.
(7) C'est pourquoi deux autres sont d'ores et déjà annoncés.
(8) Traité des Objets Musicaux, Paris, Seuil, 1/1966 2/1977, 670 p. puis 712 p.
(9) Nous pensons ici tout particulièrement à Madame Jocelyne Tournet, schaefferienne au premier rang.

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© Ed. L'Harmattan, 1999